Durant quelques annĂ©es, j’ai tenu un blog sur le soutien scolaire et le mĂ©tier de prof indĂ©pendant. Vous trouverez ci-aprĂšs une copie d’un article.
VidĂ©o âLe business du soutien scolaireâ : dĂ©bat entre Acadomia et un sĂ©nateur PS
Date de parution : 4 août 2009
DĂ©nichĂ©e au hasard de mes pĂ©rĂ©grinations sur la toile, cette vidĂ©o provenant a priori de LCP (La ChaĂźne Parlementaire) prĂ©sente un dĂ©bat sur le soutien scolaire entre Yannick Bodin, SĂ©nateur PS de Seine-et-Marne et ancien professeur de collĂšge, et Philippe ColĂ©on, Directeur GĂ©nĂ©ral dâAcadomia.
âLâinitiative si peu pĂ©dagogiqueâ dont fait Ă©tat le prĂ©sentateur au dĂ©but de lâĂ©mission est âlâaffaireâ FaisMesDevoirs.com qui provoqua un Ă©norme buzz en fĂ©vrier 2009.
Quelques remarques :
- A propos de FaisMesDevoirs.com, Philippe ColĂ©on parle de âproduitâ. Quand on a travaillĂ© 15 ans dans la pub, ça laisse des traces đ
- Le âreportage vu Ă la tĂ©lĂ©visionâ Ă propos du recrutement chez Acadomia (et chez les autres) dont parle le prĂ©sentateur est celui de EnvoyĂ© spĂ©cial : âLe soutien scolaire, rĂ©ussite ou Ă©chec ?â
- Les rĂ©ponses de Philippe ColĂ©on Ă propos de ce reportage âCâest un reportage tĂ©lĂ©commandĂ©, et on sait par quiâ, âUn certain nombre de pressionsâ nous laissent sur notre faim.
Qui télécommande ? Qui fait pression ? Des noms, des noms !
En tout cas, ces vils manipulateurs-pressurisateurs sont actifs dans lâombre depuis des mois, le reportage diffusĂ© sur Faites passer lâinfo (Canal+) âSoutien scolaire, le business de lâespoirâ pointait les mĂȘmes dĂ©rives.
Les chiffres donnĂ©s par Philippe ColĂ©on â42% des cours particuliers sont donnĂ©s au noir par des enseignantsâ, â13% des cours particuliers sont donnĂ©s au noir par des enseignants Ă leurs propres Ă©lĂšvesâ proviennent de lâenquĂȘte Acadomia-Ifop de 2005.
Je me suis dâailleurs toujours interrogĂ© sur la pertinence de cette enquĂȘte, en particulier par exemple les rĂ©ponses possibles Ă la question :
Qui a donné les cours de soutien les plus récemment reçus par votre enfant ?
Les réponses possibles sont :
- Professeur de lâĂ©cole,
- Entreprise spécialisée,
- Professeur ou ancien professeur,
- Ătudiant indĂ©pendant.
Est-on bien sĂ»r que les sondĂ©s qui ont rĂ©pondu âProfesseur de lâĂ©coleâ voulaient bien dire que lâintervenant Ă©tait prof dans lâĂ©cole de leur enfant ?
Certaines personnes interrogĂ©es nâont-elles pas en fait compris âProfesseur dans une Ă©coleâ ?
Ce qui nâest ni un Ă©tudiant, ni un organisme, est de facto un âprofesseurâ.
Sous le terme gĂ©nĂ©rique âprofesseurâ on va donc trouver :
- des enseignants retraités;
- des vacataires et contractuels de lâĂducation nationale, de lâenseignement public agricole, de lâenseignement privĂ©, de lâenseignement par alternance,âŠ, qui doivent donc pour boucler leurs fins de mois se trouver dâautres sources de revenus;
- des adultes qui ne travaillent pas dans le systĂšme Ă©ducatif et donnent des âpetits coursâ;
- quelques professionnels indépendants du soutien scolaire à domicile;
- et quelques enseignants titulaires. Ă ce sujet, vous pouvez consulter mon billet Pourquoi si peu de âvrais profsâ dans le soutien scolaire payant ?.
DĂ©duire donc des chiffres, comme le fait Philippe ColĂ©on au cours du dĂ©bat, que â42% des cours sont donnĂ©s au noir par des enseignants de lâĂducation nationaleâ, câest faire des amalgames :
- entre âcours donnĂ© par un particulierâ et âpayĂ© au noirâ. Les intervenants indĂ©pendants qui se font payer en CESU ou qui ont créé une entreprise individuelle sont oubliĂ©sâŠ
- entre âprofesseurâ (terme qui ne veut pas dire grand-chose) et âenseignant en poste Ă temps complet dans lâĂducation nationaleâ.
Ceci dit, je ne peux que donner raison au reprĂ©sentant dâAcadomia lorsquâil dĂ©plore lâabsence de dĂ©bat serein et constructif sur le soutien scolaire : sâil existe une multiplicitĂ© dâoffres de soutien, câest bien parce quâil existe une demande.
Mais lâanalyse du âpourquoi une telle demande de soutien scolaireâ ne peut se faire lors dâun dĂ©bat tĂ©lĂ©visĂ© de 3 minutes; les raisons en sont complexes, multiples, et ne peuvent se rĂ©sumer Ă quelques clichĂ©s.
Commentaires
fabrice a écrit le 4 août, 2009 à 21:57
Par oĂč commencer? Tiens, par un pavĂ© dans la mare: pourquoi un prof – je parle du fonctionnaire – donne-t-il des cours de soutien scolaire en plus de ses heures de travail? Je trouve que câest une aberration. Je sais que certains se sentent obligĂ©s, car demandĂ©s expressĂ©ment par la famille dâun de ses Ă©lĂšves (ou un haut fonctionnaire de lâĂ©tablissement, par exemple un proviseur qui veut que son enfant soit encadrĂ© par son prof en dehors des heures). Mais je ne parle pas de ceux lĂ , je parle de ceux que lâon retrouve dans les petites annonces. Comment trouvent-ils les forces de faire cela en plus (au noir, de surcroit)? A bon entendeur.
Didier Kropp a écrit le 5 août, 2009 à 8:19
@ Fabrice
Il me semble que les profs titulaires qui donnent des cours sont le plus souvent des jeunes, qui essayent de mettre un peu de beurre dans leurs Ă©pinards – la paye lorsque lâon dĂ©bute est maigre.
Fabien a écrit le 10 août, 2009 à 20:56
@ Didier
Bonjour,
VoilĂ que le gouvernement nous ressort le dossier des niches fiscales, Ă raison vu la situation du TrĂ©sor. âDiminution des baisses dâimpĂŽtsâ : en voilĂ une âricheâ idĂ©e pour ne pas dire âaugmentation des revenus de lâEtatââŠ
Mais je ne peux mâempĂȘcher de me demander ce que deviendrait le marchĂ© du soutien scolaire dans le cas (fort improbable il est vrai) dâune diminution drastique des 50% de rĂ©duction dâimpĂŽts⊠rĂ©duction du chiffre dâaffaires des grandes enseignes, ârecadrageâ du marchĂ© sur les foyers les plus favorisĂ©s ?
Quoi quâil en soit, aprĂšs plusieurs tentatives de rĂ©forme, restĂ©es infructueuses pour modifier certaines niches fiscales, cette rentrĂ©e 2009 pourrait bien ĂȘtre la bonne. Cela pourrait-il effectivement inciter les parents dâĂ©lĂšves Ă modifier leurs comportements vis-Ă -vis des cours Ă domicile ?
Bien cordialement.
Didier Kropp a écrit le 11 août, 2009 à 7:41
@ Fabien
Jâai lu que le gouvernement envisageait deux hypothĂšses :
La premiÚre consisterait à baisser uniformément tous les taux de réduction, par exemple de 10%. Ainsi, la réduction de 50% pour les emplois à domiciles passerait à 45%.
Une deuxiĂšme solution consisterait Ă appliquer une franchise, par exemple de 1%, sur les feuilles dâimpĂŽt. Un contribuable bĂ©nĂ©ficiant de 3 000 euros de rĂ©ductions dâimpĂŽt verrait ainsi son avantage ramenĂ© Ă 2 970 euros.
Une famille qui dĂ©bourse par exemple 1.600 ⏠par an pour du soutien scolaire verrait sa rĂ©duction dâimpĂŽt passer de 800 ⏠à 720 ⏠(premiĂšre hypothĂšse) ou 792 ⏠(deuxiĂšme hypothĂšse).
Ces surcoĂ»ts restent faibles et selon moi ne devraient pas affecter significativement lâattitude des familles : la rĂ©ussite scolaire de leurs enfants Ă©tait en tĂȘte des prĂ©occupations des parents en 2004 (sondage TNS-Sofres), et je ne vois rien dans le monde actuel pourrait faire baisser ce chiffre.
Par ailleurs, rien ne dit que les emplois Ă domicile seront touchĂ©s par cette Ă©ventuelle rĂ©forme. Ce secteur dâactivitĂ© est un des chevaux de bataille du gouvernement, son grand intĂ©rĂȘt Ă©tant de sortir des personnes des statistiques du chĂŽmageâŠ
Ce que je ressens depuis quelques mois au vu des contacts que jâai pu avoir avec des familles est une dĂ©fiance croissante vis-Ă -vis des organismes, le reportage dâEnvoyĂ© spĂ©cial par exemple a Ă©tĂ© vu par pas mal de monde, et le bouche Ă oreille qui marche quand on est bon marche aussi quand on lâest moinsâŠ
En rĂ©sumĂ©, personnellement, je nâai aucune inquiĂ©tude quant Ă lâavenir du soutien scolaire Ă domicile quand il est fait par des personnes honnĂȘtes et compĂ©tentes, quand bien mĂȘme les princes qui nous gouvernent rogneraient lâavantage fiscal.
Edit : je viens de trouver cette interview dâun dĂ©putĂ© UMP
Extrait : Quand on veut aussi aider Ă lâembauche de salariĂ©s Ă domicile, il sâagit de rĂ©pondre aux besoins de personnes ĂągĂ©es, dâenfants⊠et il sâagit aussi dâencourager le dĂ©veloppement du secteur de lâemploi Ă domicile. On ne peut pas vouloir une chose et son contraire. On a une politique sur lâemploi Ă domicile qui donne des rĂ©sultats, mais pas tout Ă fait aussi importants que ce quâon espĂ©rait. Ce nâest pas au moment oĂč cette politique commence Ă ĂȘtre installĂ©e et connue des Français, quâil faut dĂ©stabiliser les choses.